L’histoire se répète

L’année 1988 a marqué un tournant important dans l’histoire du Myanmar. Un mouvement en faveur de la démocratie a éclaté dans tout le pays, alimenté par le mécontentement à l’égard du régime militaire oppressif dirigé par le général Ne Win, qui avait régné d’une main de fer pendant près de trois décennies. La manifestation de 1988 au Myanmar, également connue sous le nom de soulèvement de 8888, a marqué un tournant dans la lutte du pays pour la démocratie et les droits de l’homme.

Le catalyseur des manifestations de 1988 a été la crise économique précipitée par la décision désastreuse du régime de Ne Win de démonétiser la monnaie du pays, rendant les économies d’innombrables citoyens sans valeur du jour au lendemain. L’inflation a grimpé en flèche et la frustration de la population a atteint un point d’ébullition. Ce qui n’était au départ qu’un grief économique s’est rapidement transformé en un mouvement plus large réclamant des réformes politiques, la liberté et la démocratie.

Des étudiants et des moines sont descendus dans la rue, suivis par un large éventail de citoyens, unis par leur désir de changement. Le mouvement a été baptisé « 8888 » en référence à la date de la grève nationale du 8 août 1988. Les manifestations ont rapidement pris de l’ampleur, des millions de personnes réclamant des réformes démocratiques et la fin du régime militaire.

Le régime militaire a réagi avec brutalité, déclenchant une répression violente qui a entraîné la mort de milliers de manifestants. Malgré l’effusion de sang, la détermination du peuple est restée intacte. Les manifestations de 1988 ont réussi à renverser le gouvernement de Ne Win, mais ce fut de courte durée. Les militaires, dirigés par le général Saw Maung, ont pris le pouvoir par un coup d’État et créé le Conseil pour le rétablissement de la loi et de l’ordre dans l’État (SLORC), inaugurant une nouvelle ère de régime militaire.

En 2021, le Myanmar se retrouve confronté à une situation étrangement familière. Le 1er février 2021, les militaires, sous la direction du général Min Aung Hlaing, ont organisé un coup d’État, détenant la dirigeante civile Aung San Suu Kyi et d’autres représentants élus. Le coup d’État a été mené sous le prétexte d’une fraude électorale présumée lors des élections de novembre 2020, que la Ligue nationale pour la démocratie (LND) de Suu Kyi avait remportées de manière convaincante.

Les actions de l’armée ont déclenché une nouvelle vague de protestations dans tout le Myanmar, avec des échos du soulèvement de 1988. Une fois de plus, le peuple du Myanmar est descendu dans la rue pour réclamer le rétablissement de la démocratie et la libération des détenus politiques. L’armée a réagi par une répression brutale, déployant des forces de sécurité pour étouffer les manifestations. Tragiquement, des vies ont été perdues et de nombreuses personnes ont été blessées dans le processus.

La mainmise de l’armée sur le pouvoir persiste depuis des décennies, malgré de brèves périodes de gouvernement civil. La communauté internationale a décrié le récent coup d’État, imposant des sanctions et des pressions diplomatiques à la junte militaire. Toutefois, l’issue reste incertaine, car les militaires ne montrent aucun signe de vouloir céder le contrôle.

Ces images font partie de deux albums que j’ai achetés à un antiquaire de Yangon en 2017. Elles font partie des Myanmar Photo Archive, une première tentative de structurer et de préserver l’histoire photographique du Myanmar après l’indépendance.

Lukas Birk